La rosée du matin. (Pv Lia)

Lia s’était levée très tôt ce matin et s’était rendue rapidement à l’école pour cueillir la rosée du matin sur les plantes de l’école. En effet ces goutes d’eau étaient très utiles lors de la fabrication de certains potions, notamment celle qu’elle voulait faire faire à ses élèves cette avant-midi ; une potion de chance. Ressortant donc quelques flasques vides de son sac ainsi qu’une petite aiguille, elle se rendit dans les jardins de l’école et s’agenouilla devant quelques plantes. Le plus délicat était de ne pas blessé la plante avec l’aiguille.

Prenant le petit objet pointu, elle fit glisser avec l’aide de celui-ci les goutes d’eau le long des feuilles, jusque dans la flasque. Évidemment, certaines tombèrent à côté, ce qui arracha un léger «merde» à la jeune demi-elfe à chaque fois. Elle finit par entendre des bruits de pas, qui attirèrent son attention, alors elle releva la tête en direction de ceux-ci, mais son capuchon décida de se mettre en travers de son chemin.

– Arf ! Tu fais toujours exprès toi !

Et oui, elle avait parlé à son capuchon… comme s’il allait lui répondre tiens ! M’enfin. Elle le replaça convenablement et put enfin voir ce qui avait suscité ce bruits ; un autre professeur de même race qu’elle à ce qu’elle pouvait en juger. Arrivera-t-elle à se souvenir de son nom avant qu’il ne lui demande ce qu’elle faisait ici ?... Elle tenta de s’en souvenir…

En le voyant s’approcher, et en fixant son visage, Lia alla jusqu’à se rappeler qu’ils s’étaient croisés dans son enfance, mais elle ne lui avait jamais vraiment porté attention, comme à tous les autres enfants d’ailleurs. Et son envie de solitude ne s’était guerre améliorée depuis le temps, mais ce qui lui sembla encore plus étrange était qu’elle n’avait jamais pris conscience que c’était ce même jeune homme – devenu plutôt séduisant se dit-elle – qui trainait comme elle dans les couloirs de l’Institut. Lucius… voilà son nom… du moins, elle le croyait…

– Oui, et toi Lucius c’est ça ?

Elle n’hésita pas à montrer son manque de sûreté face à sa question, alors qu’elle se releva du sol et épousseta ses genoux couverts de terre humide. Au moins elle n’en avait pas mis partout sur ses vêtements… C’était étrange de voir que tous les deux avaient atterrit au même endroit après tant d’années, bien qu’elle savait que Lucius était plus âgé qu’elle de quelques années. La jeune femme se contenta de le fixer un moment, puis se souvenant qu’elle avait une fiole dans les mains, se retourna pour la serrer dans son sac à dos, avant d’être encore plus maladroite et de la faire accidentellement tomber au sol ; elle aurait relâché bien plus qu’un léger juron si jamais ça se serait produit.

– C’est étrange, mais bien que je t’ai croisé depuis un moment ici, enfin, sans jamais vraiment te parler, je n’ai jamais fait le liens avec le garçon que j’ai connu dans mon enfance… bien que nous ne nous sommes pas d’avantage parler à cette époque…

La jeune femme se contenta de l’écouter, le laissant finir son léger monologue avant de prendre la parole à son tour. Bien qu’elle sembla chercher pendant un moment quoi lui répondre, elle se contenta de faire un léger sourire en coin. Ouvrant la bouche pour placer un mot, elle la referma après quelques secondes, semblant réfléchir une seconde fois avant de dire quoi que ce soit. Après tout, ne disait-on pas qu’il fallait tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler ?

– Je doute que tu puisse m’assister dans mes tâches, à moins de vouloir tenter de faire le cobaye à mes potions durant mes cours, mais merci tout de même, et je t’offre également mon assistance si tu en as besoin, dans quoi que ce soit. Et en effet, je ne doute pas que nous pourrons être de bons collègues même si nous ne nous parlons pas fréquemment…

Elle n’était pas de nature bavarde normalement, mais elle savait que Lucius était une personne très à cheval sur les principes et les bonnes manières, ainsi que sur les lois et les règlements. Hors, elle n’avait pas du tout envie de l’offusquer en partant du jardin aussi tôt et à le laisser tout seul. Cherchant à continuer un peu la conversation, pour ne pas que la situation devienne embarrassante et glaciale, elle se passa une main sur sa nuque.

– Alors heu… qu’es-tu venu faire dans les jardins ? Besoin d’un ingrédient toi aussi ?

Elle ne pensait vraiment pas à ce qu’il «accepterait» de servir de cobaye, mais de toute façon ce n’avait été qu’une plaisanterie ; elle n’avait pas vraiment besoin de cobaye et vu ses conditions, elle n’aurait pas pu lui faire essayer grand-chose. Et elle ne tenait pas vraiment à lui faire boire des aphrodisiaques ou des philtres d’amour, elle avait déjà eu assez d’ennuis avec ces potions dans le passé, elle n’en voulait pas d’avantages.

– Je plaisantais… je n’ai pas besoin de cobaye…

De savoir qu’il faisait le bilan, la jeune demi-elfe ne put retenir un léger ricanement. Étais-ce Rakuen qui lui avait demandé de faire cela ou le faisait-il de lui-même ? Si c’était la deuxième option la bonne, et bien soit il avait VRAIMENT du temps à perdre, ou alors il était simplement pointilleux, curieux et… étrange. M’enfin, elle n’était pas mieux non plus parfois, pouvant être très étrange elle-même.

– Ça doit être plutôt difficile de compter des plantes… et les potions, philtres, lotions et autres sont ma spécialité, bien que je me débrouille dans pratiquement tous les domaines de la magie. Ce qui touche aux sciences et aux plantes, c’est ce qui compose principalement ma force… Bien que la plupart des gens ne croient pas en la force de mes produits et me traitent d’arnaqueuse…

Lia s’apprêta à lui répondre, ouvrant la bouche pour placé un mot, alors qu’elle sentit une pression s’exercer rapidement sur elle, la faisant trébucher vers l’avant. Par chance, Lucius semblait avoir de bons réflexes puisqu’il la rattrapa sans trop de mal, elle et son sac dans l’autre main. Les étudiants pouvaient parfois êtres si pressés et impolis… Elle vit le demi-elfe les gronder mais ceux-ci ne semblèrent pas s’en soucier, ce qui lui arracha une petite mine de désolation.

Remarquant qu’il plongea son regard dans le siens, et qu’elle était toujours dans ses bras, elle ne put faire autrement que rougir comme une pivoine. Elle baissa le regard et se redressa pour sortir de ses bras ; bien que ceux-ci étaient bien confortables, et on s’y sentait en sécurité… m’enfin. Reprenant son sac également, elle marmonna un léger remerciement, n’osant point lever son regard plus haut que le sol maintenant.

– M… merci… de m’avoir rattraper… et mon sac… tu es plutôt habile. Et en effet… les gens ne respectent que plus ou moins les règlements ici, mais bon, au moins tu ne manqueras jamais de travail, et tu ne t’ennuieras pas

– Hum, de rien il faut posséder de bons réflexes quand on manie certains ingrédients fragiles, une maladresse est si vite arrivée. Mais tu n'as pas tort, j'ai fort à faire ici, ces individus manquent de disciplines mais ce ne sera que passager. Sinon que penses-tu de cet endroit ? Tu ne t'y ennuis pas de ton côté ? Je suis assez curieux de ton parcours.

Il était vrai que les réflexes étaient plutôt utiles lorsqu’on devait fabriquer certains trucs qui demandaient des quantités précises, ou lorsqu’on maniait des trucs dangereux. Cela pouvait souvent viré en cauchemars lorsqu’on ne faisait pas attention, mais souvent lorsqu’une maladresse survenait, on ne pouvait pas vraiment faire plus que réparer sa bêtise ; la plupart étaient difficilement possibles à arrêter en pleine gaffe.

Néanmoins, Lia eut un léger sourire suite à son commentaire que le manque de discipline n’allait pas duré longtemps. Elle était d’autant plus curieuse de voir comment il allait s’y prendre pour faire régner l’ordre dans cette école, alors que même la directrice ne semblait pas aussi maniaque des règlements que lui. D’ailleurs, c’était la première chose qu’elle avait remarqué en postulant ici, comparé à d’autres écoles qu’elle avait connu, Rakuen n’avait pas instauré énormément de règlements inutiles.

– Non, je ne m’y ennuis pas, bien que mes élèves semblent moins de mon avis dans mes cours. La plupart n’écoutent pas. Et l’endroit est super, la directrice et l’ancien directeur ont fait du bon travail, je pense que les élèves, en sortant d’ici après leurs trois ans, doivent devenir bien puissants. Pour ce qui est de mon parcours j’ai simplement quitté la cité elfique à ma maturité, voyager un peu et atterrit finalement ici. Tant qu’à vivre de mes potions, je me suis dit que je pouvais bien enseigner mes connaissances à d’autres, et même si les élèves de première année ne semblent pas enchantés par mon cours, ça change une fois la deuxième année entamée normalement, puisque les potions peuvent être bien utiles dans la vie et…

Se rendant compte qu’elle était bien partie pour réciter un roman, Lia posa sa main sur sa bouche et s’arrêta. Elle ne tenait pas non plus à le saouler en parlant trop, ce qui d’ailleurs la surprenait puisqu’elle n’était pas du genre à parler autant normalement. Peut-être qu’elle était simplement en manque de communication. Retirant finalement sa main après quelques secondes, et après surtout s’être calmée, elle plongea de nouveau son regard bleu dans celui de Lucius.

– Et toi ? Comment es-tu passé de Juge à Professeur ?

La jeune demi-elfe suivit Lucius de ses quelques pas et s’assit à ses côtés sur le banc, plongeant son regard bleu ciel dans les yeux profonds de son collègue et écouta son récit. Elle en fut d’abord surprise, puis triste pour lui. Elle posa sa main sur son bras en signe de condoléances. Elle pouvait comprendre à quel point cela avait dut être difficile, et comprendre que cela avait pu être néfaste sur son travail. Enfin, elle ne pouvait pas vraiment comprendre, puisqu’elle n’avait jamais perdu un de ses proches, encore moins un petit-ami ou un époux, mais elle pouvait s’imaginer à quel point cela devait être douloureux. Probablement même que ce qu’elle imaginait n’était rien à comparé à la vraie douleur qu’on doit ressentir. C’était extrêmement dommage pour lui qu’en plus, il avait perdu son emploi.

– Mes sincères condoléances pour ta femme… Je trouve ça horrible que certaines personnes possèdent assez de méchanceté et de manque d’humanité pour arriver à tuer quelqu’un…

Ensuite, Lia eut un léger sourire. Il était vrai que la directrice était une personne qui semblait faire confiance à tout le monde, et leur donnait si facilement la seconde chance qu’ils méritaient. Bien que parfois, cela devait sûrement jouer contre elle dans certaines situations, puisqu’elle devait sûrement se faire jouer dans le dos souvent.

– Puis… tout le monde mérite une deuxième chance. Ce n’est pas parce que tu as été rongé par la tristesse que ça fait de toi une mauvaise personne…

¬– je te remercie, c'est gentil de ta part de me voir ainsi alors que nous n'avons jamais pris le temps de nous connaitre, enfin il n'est pas trop tard je suppose…

La demi-elfe sourit de nouveau à son interlocuteur. En effet, il valait toujours mieux tard que jamais, et il n’était jamais vraiment trop tard pour faire connaissance avec quelqu’un, même d’une personne qu’on avait déjà aperçu dans notre jeune temps et qu’on n’avait pas pris le temps de connaître à cette époque. Puis de toute façon, dans son jeune temps, s’il était vraiment venu lui parler, Lia l’aurait probablement ignoré ou simplement regardé étrangement sans lui répondre, car elle ne parlait à personne en ce temps, et détestait les autres enfants. Elle était bien plus souvent camouflée derrière son père et à rester près de lui, ou être seule, plutôt qu’avec d’autres enfants de son âge.

Entendant finalement la cloche de la première période sonner, la jeune femme sursauta et se releva d’un seul bond. Elle était en retard pour son cours !! Et ça n’était pas la première fois ! Rakuen n’allait pas être très contente si elle continuait toujours dans ce rythme. Elle plongea son regard dans celui de Lucius et s’inclina un peu en signe d’excuses.

– Pardonne-moi, mais je suis en retard pour mon cours, je dois partir pour le moment, bien que j’espère pouvoir reprendre cette conversation, ou une autre, avec toi bientôt… à la prochaine…

Défilant rapidement à travers les jardins, elle ne perdit pas de temps et retourna à l’intérieur de la bâtisse à la course. Certes, il l’aurait probablement grondée de courir dans les couloirs, mais c’était un cas de force majeur cette fois. Arrivant finalement à sa classe de cours, les élèves l’attendant toujours attroupés autour de la porte, elle déverrouilla celle-ci et les laissa entrer, commençant le début de son cours.