Aux abords du village Centaure d'Ibrîniðilpathânezel, proche d'Ingwuië.

Ses sabots frappaient de colère sur le sol boueux à cause de la neige qui était tombée quelques jours auparavant.
L'hiver n'avait pas été rude cette année, il ne faisait pas très froid mais la forêt avait tout de même perdue de son éclat.
Les arbres, nus, semblaient plongé dans un sommeil profond. Les animaux se faisaient plus rare, cachés ou partis.
On pouvait entendre le silence oppressant de la forêt endormie ce qui rendit les fracas des sabots encore plus bruyant.

La serpe trancha rapidement la tige d'une bruyère, seule survivante aux alentours.
La jeune centaure rangea précieusement sa serpe en l'attachant à sa ceinture de cuir. C'était une serpe banale à première vue mais pour un œil avisé cette serpe avait quelques particularités importantes. La lame en fer forgé était gravée d'une multitude de runes druidiques anciennes ; le manche en bois avait été taillé dans un bois sacré pour le fier peuple équidé.
La bruyère rejoint les autres plantes récoltées dans la petite sacoche en peau tombant sur son flanc ; sur le flanc droit se trouvait les plantes médicinales, sur le flanc gauche, les toxiques.




Soudain le bruit assourdissant de sabots se firent entendre. C'était un bruit beaucoup fort que celui que provoquait les sabots de la petite druidesse. En effet, il s'agissait de deux mâles. Ils galopaient en direction d'Ingwuië. Un endroit si proche et pourtant si loin pour la centauresse.
Les centaures d'Ibrîniðilpathânezel suivaient des règles très strictes. Les mâles se devaient de quitter le village dès leur majorité, ils devenaient chasseurs, certains voyageaient pour découvrir le monde, d'autres devenaient gardiens des Bois selon leur appartenance à telle ou telle caste et sous quel totem ils étaient nées. Les mâles revenaient au village seulement pendant les jours sacrés où la Grande Matriarche se devait d'organiser un banquet et de réunir les femelles qui leur seraient offert pour leur visite, en échange ceux-ci offraient leurs savoirs, leurs découvertes, leurs gibiers etc.
Les deux centaures approchèrent, ils étaient des chasseurs. Elle les connaissaient bien.

Kementari riait en regardant les deux centaures s'éloignés. Ces deux frères étaient inséparable depuis leur naissance. Ils étaient très différent mais elle les appréciait tous les deux.
Se retrouvant seule, elle cessa de rire et baissa la tête.
Au loin elle entendait les appels de sa dame de compagnie qui était beaucoup plus une sorte de garde du corps.

Misère.. Lui qui avait pensé faire une tranquille petite balade, voilà qu'il se retrouvait les pieds dans la boue, une biche sur les épaules. Seule la hausse avait étée bonne. Il avait bien du mérite d'avoir réussi a attraper cet animal. Ce n était pas son but premier, mais tant qu'à faire, il voyait aisément qui il pourrait inviter a un barbecue nocturne, enfin passons sur ce sujet. Il soulevait difficilement ses grosses bottes de la terre. Le terrain où il se trouvait, était légèrement ascendant, et il se retrouva rapidement haut dans la forêt. Il n'avait pas peur de la hauteur, bien au contraire. Il se pencha vers le bord, comme a son habitude, pour admirer le paysage. Des monts verdoyants, des arbres a perte de vue.. Il remerciait Gaïa de ce cadeau éternel.

Mais cette fois, une chose dérapa. Son pied plus particulièrement. D'ordinaire il N'aurait eu aucun mal a se raccrocher, mais la, il avait des bottes et une biche sur le dos. Il tenta en vain de s'accrocher avec une main, sans autre réussite que de faire tomber la biche, en même temps que lui. Il dégringola la forêt, sa tête butant quelques buissons. Par chance, il ne heurta pas de tronc d'arbre. Sans ça, il ne serait sûrement plus de ce monde. On ne pouvait pas en dire autant de la biche. Elle s'était lamentablement écrasée contre une grosse roche, ne laissant que des chairs et des ventrailles éparpillées. Alors seulement, sa chute prit fin. Il roula sur une pierre, étant propulsé en l'air, quittant les feuillages... Pour atterrir sur le chemin de terre, où il s'écrasa, sentant même un 'CRAC' sonore dans son nez. Lorsqu'il osa enfin relever la tête, enfin des lors qu'il le pût, il regarda devant lui. Sa chasse était perdue.

Alors il vit des sabots, avec des pattes poilues qui les continuaient. Un autre gibier! Décidément la chance lui souriait aujourd'hui. Il dégaina sa hache, éleva sa tête, s'apprêtant a frapper. Il vit soudain un corps et une tête de femme, montée sur le corps d'un cheval sauvage.. Jamais il n'avait vu cela de toute sa jeune vie. Il recula avec méfiance, se demandant si elle possédait des attributs humains, tels la parole.

- Bonjour, parles tu ma langue, ô terrifiante création de Gaïa?

"Je ne vous ferais aucun mal, vous parlez l'elfique ou le sylvestre ?" Dit-elle en sylvestre.

Pour toute réponse, elle lui bredouilla quelques mots de charabia, dont il ne comprit pas un mot. Le dialogue allait être compliqué. Mais il n'abandonnerait pas! Cette créature l'intriguait, et il voulait la connaître.. Ils ne pourraient sûrement jamais devenir amis, mais avec un peu d'efforts,ils pourraient apprendre a se connaître. C'était principalement ce corps hybride qui l'intéressait. Était ce une femme, ou une jument, ou bien... En tout cas, elle avait l'air aussi étonnée que lui. Elle n'avait peut-être jamais vu d'humain. Il lui fit des gestes de la tête, pour lui faire comprendre qu'il ne parlait pas sa langue. Puis, toujours avec des gestes en l'airs, il lui dessina une femme, puis un cheval, et dessina un point d'interrogation. Cela était trop flou, il prit alors un papier, une plume, de l'encre, et s'assit en tailleur. Il lui refit le dessin, espérant une réponse. Elle avait l'air de comprendre un peu mieux ainsi. Parfait, peut être pourrait il communiquer.

L'homme ne comprenait pas ses paroles. Il regardait la jeune centauresse d'un air sceptique quand elle parlait.
Kementari soupira en comprenant qu'elle ne pourrait peut-être pas le prévenir à temps.
Elle s’apprêtait à dégainer son arc pour l'effrayer et lui sauver la vie mais l'être humain se mit à gesticuler dans tous les sens.
Cherchait-il à lui faire comprendre quelque chose ? Elle se ravisa alors que celui-ci sortait des feuilles de papier, le même que les mâles avaient découvert il y a quelques temps en revenant du village elfique tout proche ainsi qu'une plume et de l'encre.


Le jeune homme dessinait quelque chose sur le papier jaunis. La plume grattait rapidement le feuillet et laissait apparaître quelques dessins très simples : un être humain femelle, une jument et un signe qu'elle ne connaissait pas " ? ".
Elle s'approcha prudemment pour regarder plus attentivement et réfléchir à la signification.

"... Je ne suis pas une Jument ... Hmm. Moi, Centaure. CEN-TAURE."

Kementari s'évertuait à faire répéter le mot "centaure" à l'humain tout en se désignant du doigt. Comprendrait-il ?

"Maîtresse !!! Je vous en pries revenez !! Votre Mère la Matriarche va me faire exécuter si vous n'en faites qu'à votre tête !!"

La plainte de la servante se fit entendre et cette fois-ci même l'être humain pouvait l'entendre clairement.
Kementari sembla paniqué et jeta des regards en tout sens pour trouver une cachette au jeune homme. Les pas de sa servante se rapprochait elle était toute proche. Kementari ne voulait pas la laisser détruire l'être humain, elle ne voulait plus se cacher des autres races. Dans un élan elle attrapa son interlocuteur sans trop de précaution et le déposa sur sa croupe nue. L'homme était très léger, elle eut l'impression de porter un tout petit animal.

"Maîtresse !? Que ... !?"

Lorsque sa garde du corps sortit des buissons elle aperçue sa jeune maîtresse galoper à toute hâte, un humain sur son dos. Elle prit son arc et dans un cri de rage décocha une flèche avec une grande précision sur l'agresseur. Kementari était rapide elle disparu rapidement mais sa servante n'allait pas laisser tomber.

"Elle va croire que cet homme m'a capturé..."

En quelques secondes elle prit sa décision. Elle devait quitter la forêt.

Après que la jeune 'bête' eut lût ses dessins, elle sembla comprendre. Elle lui fit des gestes, montrant la femme, secouant la tête, montrant la jument, secouant la tête. Puis elle recommença a parler dans cette langue incompréhensible. Mis cette fois ci, il perçut un mot, qu'elle s'évertuait a répéter, sans cesse, avec un très fort accent animal. Centaure.. Ou quelque chose dans le genre. Quel spécimen étrange. Il s'apprêtait a lever les yeux aux ciels, voulant remercier Gaïa de lui avoir permis de rencontrer une telle création. Mais une autre voix de femme l'interpella. Elle parlait dans la même langue. Elle avait l'air..apeurée ou énervé peut être, au vu de ses cris. Alors, la jeune centaure, puisque cela semblait être sa race, se mît a paniquer. Elle regarda derrière elle, regarda le jeune homme, passant très vite de l'una l'autre, visiblement effrayée. Alors elle le souleva comme un vulgaire sac de pommes de terre, télé déposa aussi négligemment sur sa croupe. Se sentant un peu gêné vis a vis de son corps de femme, il se avança un peu. La croupe d'un cheval était certes agréable, mais quand vous savez que cette créature est a moitié humaine... Il aperçut, en se retournant, les cheveux dans le vent, qu'une autre de ces créatures féeriques les suivaient. Elle avait un regard haineux.. A la vitesse de l'éclair, elle décocha une flèche, avec une précision ahurissante. Elle aurait pu lui planter une flèche sous l'ongle du petit orteil sans problème. Mais sa "monture" fut plus rapide...

Kementari galopait aussi vite qui lui était possible, ses sabots faisaient une symphonie de fracas grondant comme le tonnerre.
Elle évitait agilement les branches et autres obstacles, elle se déplaçait tel le vent. Sa chevelure virevoltait comme une pluie dorée de feuilles d'automnes.
Sa servante n'était plus visible mais elle ne voulait pas s'arrêter. Elle savait qu'elle n'était pas loin derrière.
Elle traversa les bois, elle sauta au dessus d'une rivière gelée et s'aventura au centre d'une clairière.
Là reposait un immense rocher ornementé de plusieurs peintures. Elle ralentissait doucement pour se cacher derrière. Essouflée, elle posa sa main gauche sur le rocher et ferma les yeux.
" Esprits, aidez-moi..."


Après un petit moment de méditation elle tourna la tête pour observer son petit protéger.
Elle n'avait pas été très douce et la course l'avait peut-être mal mené.
Heureusement elle avait gardé les plantes médicinales qu'elle avait récolté avant cette rencontre farfelus.

" Ai-je fais le bon choix ? Je vais être châtier pour avoir fuis ainsi avec un humain. ... Je ne pourrais probablement plus revenir au village de Mère."

Elle réfléchissait.

La "centaure" avait l'air préoccupée. Qu'est ce qui occupait ses pensées. Enfin,en considérant que cette espèce primitive possédait des capacités de réflexion. Cette expression du visage ne reflétait peut être que la faim, ou la soif, les besoins primaires. Il commençait a se poser tout un tas de question, oubliant totalement de se préoccuper de lui-même. C'est pour cette raison qu'il se fit "brancher" par un chêne, ne le laissant sur la femme-cheval que par chance. Il chancelait, menaçant de tomber. Mais non. Elle s'arrêta peu de temps après, se retournant vers lui. Pour une peuplade primitive, ces animaux avait l'air de savoir se tenir, et de penser, ne serait ce qu'un peu. Il descendit au sol, prenant garde de ne pas faire de bruit,ne voulant pas ruiner les efforts de fuite de son spécimen. Il jouirait seul de cette découverte. Il ne savait bien sûr pas que les centaures sont une espèce connue du monde. Il lui fit un sourire, langage universel. Puis il se mît a lui tourner autour, l'examinant sous tous les angles, même les plus indiscrets. Elle avait une poitrine de femme, assez jolie, soi-dit en passant, a peine camouflée, des courbes, et des hanches qui feraient pâlir le moindre des hommes. Puis, ses jambes devenaient poilues, se prolongeant de sabot. Son corps était semblable a celui d'un pur-sang. Racé, élégant, puissant.

- Quelle beauté.. Comment t'appelles tu?

Puis il se souvint qu'elle ne le comprenait pas. Il ressortit sa feuille, faisant un dessin d'elle, puis de lui même. Se montrant lui, il dit.

-Tenzû!

Puis il lui montra l'image qui lui correspondait, refaisant le symbole '?'

Soudainement son petit protégé se releva et lui lança un sourire.
Essayait-il de la remercier ? Avait-il compris le danger qui l'avait menacé un peu plus tôt ?
Pendant que Kementari réfléchissait à tout ce qui lui arrivait le petit humain se mit à lui tourner autour, il regardait le corps de la centauresse sur tous ses angles et même les plus gênant. C'était inadmissible, au village il en aurait très certainement payé de sa vie pour un acte comme celui-ci. Détailler la future Matriarche de la sorte, quelle idée, mais Kementari s'en amusa, c'était bien la première fois qu'on ne la traitait pas selon la tradition.
Elle se laissa donc faire.

Après quelques minutes l'humain semblait satisfait. Il dit alors :

"Quelle beauté.. Comment t'appelles tu?"

Et, semblant se souvenir que Kementari ne comprenait pas, il redessina quelques chose. C'était ...

"C'est moi ça ? ... Hum ..."

Il pointait l'humain qui était dessiné et dit "Tenzû", c'était sans doute son nom. Après quoi il pointa l'autre dessin.
Il souhaitait peut-être connaître son nom. La centauresse se pointa du doigt et dit le plus clairement possible :

"Kementari"